Pour gagner, notre ténacité sans faille

Rédigé le 26/02/2021


Faire entendre la voix des salariés, c’est argumenter son opposition à des réformes qui, bien que rejetées par les travailleurs, sont cependant poursuivies et cela sur fond de crise. Faire entendre leur voix, c’est contrer entre autres aussi les aspirations patronales à de nouvelles dérogations au droit du travail…

Par la ténacité, la lutte syndicale porte ses fruits. Ce sont les négociations Ségur qui avancent, même à pas saccadés, ou encore la nationalisation maintenue pour l’instant des Chantiers de l’Atlantique... Aperçu de la détermination de FO pour qu’aboutissent les revendications.

Ce n’est pas aux travailleurs de payer la crise !

A lors que les travailleurs sont durement impactés par la crise, FO souligne la nécessité de les protéger plus que jamais. C’est le message réitéré le 29 janvier lors d’une rencontre bilatérale avec le Premier ministre.  Le quoi qu’il en coûte ne doit pas devenir   quoi qu’il en coûte aux salariés !, a insisté le secrétaire général, Yves Veyrier, notant que l’évocation du coût qu’aura la crise fait d’ores et déjà redouter qu’il pèse sur les salariés d’aujourd’hui et de demain. Ce à quoi s’oppose la confédération. Elle a rappelé son refus de voir ressurgir la réforme des retraites ou encore la logique de celle sur l’Assurance chômage.

Alerte sur l’AGS

FO a pointé aussi le risque de fragiliser le dispositif de garantie des salaires en cas de faillite d’une entreprise (AGS, dispositif patronal né en 1973 et sous délégation de l’Unédic) via la transcription (par ordonnances) d’une directive européenne sur la restructuration et l’insolvabilité en cas de liquidation. En effet, cela remettrait en cause la priorité donnée au paiement des salariés, au bénéfice des banques, mandataires et administrateurs judiciaires. FO a par ailleurs indiqué à nouveau sa demande d’un contrôle strictindispensable des entreprises qui bénéficient des aides publiques. La confédération s’indigne en effet des suppressions d’emplois et restructurations annoncées quand, à l’évidence, la crise sanitaire sert d’aubaine ou d’accélérateur.

Réforme de l’Assurance chômage : la concertation est relancée

L a réforme de l’Assurance chômage, combattue par FO, ne devrait pas entrer en vigueur en avril 2021, du moins dans sa globalité. C’est ce qui ressort des rencontres en bilatérales organisées le 25 janvier entre la ministre du Travail et les interlocuteurs sociaux, relançant la concertation sur le sujet.

La conjoncture économique est particulièrement défavorable à un durcissement des droits des demandeurs d’emploi. Selon les données de la Dares publiées le 27 janvier, le nombre de chômeurs sans aucune activité (catégorie A) a bondi de 8,1 % sur l’année 2020.

Indicateurs ou pas, FO dit non à la réforme

La ministre Élisabeth Borne a laissé entendre que l’entrée en vigueur de la réforme pourrait être liée à une amélioration du marché de l’emploi. Certaines dispositions (éligibilité et dégressivité) pourraient notamment évoluer en fonction d’indicateurs du marché du travail qui restent à définir.

Nous n’allons pas discuter d’indicateurs pour une réforme dont nous ne voulons pas, prévient Michel Beaugas, secrétaire confédéral FO chargé de l’emploi, qui avait de nouveau rendez-vous le 9 février avec le ministère du Travail. Pour chaque thème, nous dirons pied à pied pourquoi ce n’est pas bon. Il demande également qu’une place soit laissée à la négociation collective entre interlocuteurs sociaux.

Dans le cadre de la concertation, une réunion multilatérale est programmée dans la seconde quinzaine de février. Le gouvernement envisage ensuite de publier un décret fixant de nouvelles règles.

Économie : toujours les incertitudes liées à l’épidémie

L’économie reste détériorée et on peut craindre une nouvelle dégradation de l’activité. L’Insee prévoit, en l’absence de confinement, une croissance de 1,6 % au premier trimestre 2021. A contrario, le PIB se rétracterait de 1 %. Quoi qu’il en soit, il restera sous son niveau d’avant crise. Et le  6 % de croissance, acté par la loi de finances pour 2021, est peu probable. En fort rebond en décembre (+ 23 %), la consommation des ménages est de 7 % inférieure en janvier à son niveau d’avant crise.

Les secteurs industriels voient l’embellie 

Les ménages, inquiets pour leurs emplois, sont pour l’instant plus enclins à épargner, quand ils le peuvent, qu’à consommer.

Sur 2020, ce moteur de la croissance avait chuté de 7,1 %, la production de 8,6 %, l’emploi salarié de 1,8 % tandis que le chômage (en catégorie A) augmentait de 7,5 %. Avec un plongeon du PIB de 8,3 % en 2020, note encore l’Insee, la récession, quoique historique, a toutefois été moins marquée que prévu (9 % ou 11 % selon les sources). En ce début 2021, les incertitudes liées à l’évolution de l’épidémie pèsent toujours. L’Insee révèle toutefois que la plupart des secteurs industriels prévoient d’ores et déjà un fort rebond(+ 10 %) de leurs investissements. Reste à savoir si cela bénéficiera à l’emploi et aux salaires, cela alors que les entreprises reçoivent des aides publiques, plus massives que jamais depuis le début de la crise.

DDI : les agents désorientés par les réformes

À  peine la réforme sur les préfectures réalisée en 2017 qu’une autre est venue jeter le trouble : la réforme de l’organisation des administrations territoriales (OTE), visant notamment les DDI, les directions départementales interministérielles. Nées en 2010 et rattachées au Premier ministre, elles regroupent d’anciennes directions ministérielles. Depuis 2018, ces DDI aux compétences multiples (écologie, urbanisme, répression des fraudes, logement, jeunesse et sports…) sont en pleine restructuration. Elles sont rattachées au ministère de l’Intérieur depuis l’été dernier et sur les fonctions support, des secrétariats généraux communs avec les préfectures sont en vigueur depuis le 1er janvier. Et ce n’est pas fini, la réforme prévoit notamment des transferts de missions entre structures.

Un baromètre social au bilan morose

En janvier, lors d’un CHSCT des DDI, FO rappelait ses inquiétudes : « Aucune DDI n’est épargnée par les chamboulements d’organisation, de rattachement, d’inter-départementalisation et/ou de plateformisation des missions », et sans oublier « les revues de missions, qui ne seront pas sans douleur et sans conséquence sur des effectifs déjà exsangues... une nouvelle fois ». Lors du dernier baromètre social des DDI, 73 % des agents ont dit ne pas avoir confiance en l’avenir (+ 7 points comparé à 2017), 63 % ont déclaré ne pas avoir de visibilité sur l’évolution de leurs missions et 66 % sur l’évolution de leur structure. La direction de la modernisation et de l’administration territoriale (DMAT) en déduit qu’ils s’interrogent sur « leur place au sein des DDI ». Judicieux, sachant que l’effectif des DDI a reculé de plus d’un tiers en dix ans.

FO ne laissera pas normaliser le travail dominical

A près avoir accordé des dérogations pour l’ouverture des commerces le dimanche dans la plupart des départements en janvier, des préfets ont aussi pris des arrêtés pour le mois de février. Le gouvernement s’appuie sur l’état d’urgence sanitaire et le couvre-feu à 18h pour justifier ces dérogations. Il a renvoyé la décision aux préfets, après concertation avec les collectivités locales et les interlocuteurs sociaux. Les désirs de certains clients ne doivent pas porter atteinte à la vie personnelle et participer à la destruction de la cellule familiale des salariés et nier leur droit à une vie privée, prévient Arnaud Pichot, secrétaire général de l’UD FO Drôme-Ardèche, qui a rappelé à l’inspection du travail l’attachement de FO au repos dominical.

 On met la pression

La FGTA-FO s’est opposée aux ouvertures dominicales des grandes surfaces. Et ces ouvertures ont tendance à s’arrêter car on met la pression, souligne Dejan Terglav, secrétaire général de la FGTA-FO. La grande distribution n’a jamais fermé durant le confinement, les enseignes n’ont pas perdu d’argent. Les salariés sont fatigués et ils ont peur, il ne faut pas en rajouter, poursuit le militant, craignant une normalisation du travail dominical si les exceptions se multiplient.

David Malézieux, secrétaire fédéral à la FEC-FO, rappelle aussi que l’amplitude horaire est déjà en hausse pour certains salariés, avec des commerces qui ouvrent plus tôt et parfois font sauter la pause du midi. Tout est bon pour déroger au Code du travail, c’est un engrenage, alerte-t-il.

Ségur de la santé : sa pleine extension au social et médico-social tarde à venir

Cela piétine, déplore le secrétaire général de la SPS-FO, Didier Birig, évoquant les négociations sur l’extension du Ségur au social et médico-social. La commission avait laissé entendre précédemment qu’elle obtiendrait l’arbitrage du gouvernement sur l’ensemble du dossier, mais le 3 février le ton avait changé. La troisième réunion de la commission pilotée par Michel Laforcade a en effet donné lieu à  une volte-face, explique la SPS-FO. A priori, les agents des établissements publics de santé et des Ehpad percevraient bien le complément de traitement indiciaire (CTI), soit les 183 euros du Ségur, mais pas les personnels des établissements autonomes (sous convention tripartite). En amont d’une nouvelle réunion le 9 février, la SPS-FO exigeait leur intégration immédiate.

Des actions et mobilisations à construire

Les secteurs FO du social et médico-social (FNAS-FO et UNSFO-SP) demandent une négociation globale pour tous les salariés, et refusent que le CTI soit accordé aux seuls soignants, dont les métiers sont en tension et dont les établissements sont financés, en partie ou en totalité, par la Sécurité sociale. Cerise sur le gâteau, la commission propose aussi le principe de l’intéressement pour les moniteurs éducateurs et les éducateurs spécialisés…

Les négociateurs de trois organisations, dont FO, ont décidé de convier les autres syndicats représentatifs de ces secteurs à une prochaine intersyndicale. Objectif : définir  les actions et mobilisations à construirepour faire entendre les revendications.

Chantiers de l’Atlantique : pour que perdure la nationalisation

La cession des Chantiers de l’Atlantique à l’italien Fincantieri n’aura pas lieu et l’État reste donc l’actionnaire principal (84,3 % du capital depuis juillet 2018) du site de construction navale de Saint-Nazaire (plus de 3 000 salariés, 5 000 sous-traitants). L’abandon du projet a été annoncé par les gouvernements français et italien (qui détient Fincantieri à 72 %) le 27 janvier, motivé par « le contexte économique actuel ». Engagé depuis 2017 à la suite de la faillite du propriétaire sud-coréen STX, l’accord de cession (renouvelé cinq fois) à Fincantieri s’achevait le 31 janvier. « Le naufrage des chantiers a été évité », se félicite FO Métaux, remerciant « tous ceux qui se sont battus avec FO pour que les savoir-faire et les technologies des Chantiers de l’Atlantique ne soient pas pillés par l’industrie chinoise de ce secteur ».

Une visibilité retrouvée

Derrière la vente à Fincantieri, en contrat avec un chantier chinois, il y avait notamment la crainte d’un « transfert des technologies et de marchés », rappelle le secrétaire général de la confédération, Yves Veyrier, qui s’était rendu sur le site début janvier. Mais si l’État conçoit la nationalisation comme « provisoire », il est nécessaire au contraire que la « situation perdure le plus longtemps possible, les banques et les clients y ayant retrouvé de la visibilité. Et les commandes vont pour l’instant jusqu’en 2025 », insiste Nathalie Durand-Prinborgne pour la section FO Métaux des Chantiers. Quant à l’intérêt réitéré pour les Chantiers par le fondateur de Bricorama, la section FO ne perçoit pas la crédibilité qu’aurait sa candidature et doute de la volonté de dialogue social de cet industriel, qui « n’a même pas jusque-là rencontré les syndicats » du site.