Carrefour condamné, la franchise participative en question

Rédigé le 14/05/2021


Le tribunal de commerce de Caen reproche à Carrefour sa gestion "égoïste" au détriment d’un franchisé Contact. Par sa portée, le jugement pourrait réduire significativement le champ d’action des distributeurs qui entrent au capital de leurs franchisés. Carrefour a fait appel. 

Abus de minorité. Cette formule juridique résume ce qui est reproché à Carrefour dans un dossier l’opposant à un franchisé Contact normand. Le 7 avril dernier, le tribunal de commerce de Caen (14) a condamné Carrefour non pour son comportement en tant que franchiseur, mais pour son attitude en tant qu’actionnaire minoritaire du magasin de proximité. 

La franchise participative est un montage classique, assez délicat à piloter. Quand une tête de réseau prend une participation minoritaire au capital d’un franchisé, c’est en général autant pour l’aider (l’entreprise est plus solide financièrement) que pour s’assurer qu’il ne partira pas trop facilement à la concurrence. 

La relation, normalement harmonieuse, se dégrade dès que les intérêts des deux parties divergent. Dans le cas concerné par le jugement, le franchisé, désireux de changer d’enseigne, reprochait à Carrefour de faire de façon déraisonnable obstruction à sa décision. 

Carrefour a "poursuivi égoïstement son intérêt propre"

Dans son jugement, le tribunal a validé les arguments du franchisé, estimant qu’un changement d’enseigne serait en effet profitable à l’entreprise et que Carrefour, en s’y opposant, n’agissait pas comme un bon co-actionnaire. 

Selon la décision publiée, le distributeur "n’a fait que poursuivre égoïstement son intérêt propre au détriment de l’exploitation du fonds de commerce"

À lire les attendus du jugement, on comprend donc que le représentant d’un franchiseur, dès lors qu’il est associé minoritaire d’un magasin, devrait agir avant tout dans l’intérêt du franchisé et non dans celui de la tête de réseau. Une injonction qui ne fait pas les affaires, on s’en doute, des distributeurs.

Contacté par Linéaires, Carrefour France répond que l’abus de minorité n’est selon lui pas constitué et qu’il a fait appel du jugement. Le dossier, plaide-t-on au siège de l’enseigne, n’a pas de portée plus large que le seul cas particulier qu’il concerne. Le distributeur n'y voit donc pas une remise en cause du principe des participations minoritaires au capital des franchisés.